La toponymie svalbardienne est remarquablement amicale pour le voyageur étranger, puisque chaque nom de lieu est descriptif. Les noms de fjords se terminent par "fjord" ou "sund". Les baies ont le suffixe "bukta" ou hamna, les glaciers "breen" et les îles "oya". Par exemple, Monacobreen, nommé par le prince du Rocher, Hornsund, où de nombreux bois de rennes avaient été trouvés, ou encore Bjornoya, l'île aux ours et Isfjord, le flord des glaces.
Le nom de Lilliehookfjorden, un fjord secondaire du grand Krossfjord (le fjord en form de croix), surprend davantage. Il conserve la mémoire de Gustaf Bertil Lilliehöök, explorateur suédois. Sur sa rive, des montagnes hautes et fines forment une véritable muraille. Je rêve de courir sur ce chemin de ronde, perché entre deux immenses fjords.
Lilliehooksfjorden
Durant la seconde guerre mondiale, une station météo s'y était établie avant d’être détruite par un sous-marin. La carte lui attribue le nom de Signehamna.
Elle ne semble pas avoir été sondée, et nous distinguons à peine sa minuscule entrée hérissée de rochers. Voilà un endroit à explorer Nous profitons de la marée haute pour nous approcher tout doucement, les yeux rivés au sondeur. Nous rentrons tout juste dans l'anse, avec un petit mètre d'eau sous la quille, et jetons l'ancre en plein milieu, anticipant les rafales catabatiques et la marée descendante.
La carte ne précisant aucun nom, nous nous octroyons le droit de baptiser notre abri. Sommes-nous vraiment les premiers à le faire ? Plutôt que de faire honneur aux phoques qui viennent rapidement nous rendre visite, nous rendons un hommage symbolique à notre voilier.
Lorsque le plafond nuageux remonte légèrement, il ne nous permet pas encore d’apercevoir les sommets mais dévoile leurs flancs.
Sur la plage de Baladinbukta, nous effectuons un relevé OSPAR. Notre pêche dans les lacs à moitié gelés qui surplombent le fjord se révèle infructueuse, et nous cassons une ligne !